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Aphasie après un avc : causes, types et rééducation

Aphasie après un avc causes, types et rééducation

Aphasie après un avc causes, types et rééducation

Javier Esteban Libiano, neuropsychologue, explique dans cet article ce qu’est un accident vasculaire cérébral (AVC) et quels types d’aphasies peuvent affecter les patients concernés.

Accident vasculaire cérébral (AVC) : définition

L’AVC ou accident vasculaire cérébral, communément appelé « ictus », désigne tout dysfonctionnement cérébral causé par une altération pathologique des vaisseaux sanguins.

À la suite d’un accident vasculaire cérébral, l’une des conséquences fréquemment observées est la perte ou la difficulté d’utilisation du langage chez les patients. Ce trouble est appelé aphasie et se caractérise principalement par un déficit de la communication verbale, avec des erreurs dans la production et la compréhension du langage. Grâce à la neuroréhabilitation et aux outils de la neuropsychologie, il est possible d’intervenir afin de favoriser la récupération et la rééducation des patients ayant subi cette pathologie.

L’accident vasculaire cérébral (AVC), également appelé infarctus cérébral, apoplexie, attaque cérébrale ou hémorragie cérébrale, est défini comme un trouble de la circulation sanguine cérébrale, qui se divise en deux types :

  1. AVC ischémique : survient de manière brutale et est provoqué par une occlusion artérielle, c’est-à-dire qu’une artère est obstruée par un caillot sanguin ou une embolie. Il représente environ 85 % des cas.
  2. AVC hémorragique : causé par la rupture d’une artère ou d’un anévrisme, entraînant une hémorragie cérébrale.

Incidence de l’AVC

Incidence de l’AVC à l’échelle mondiale

On estime que une personne sur six dans le monde sera victime d’un AVC au cours de sa vie. L’AVC demeure un problème majeur de santé publique, associé à un taux de mortalité élevé et à des séquelles invalidantes s’il n’est pas pris en charge rapidement. Il s’agit de la première cause de mortalité chez les femmes et de la principale cause de handicap en Europe.

Incidence de l’AVC en Espagne

En Espagne, selon les données du Rapport Annuel du Système National de Santé 2023-2024, les maladies cérébrovasculaires touchent 1,6 % de la population. La prévalence augmente après 40 ans, atteignant plus de 10 % chez les personnes de plus de 85 ans. Bien que l’AVC puisse survenir à tout âge, sa prévalence est plus élevée chez les hommes dans toutes les tranches d’âge, sauf entre 25 et 44 ans, où elle est légèrement plus élevée chez les femmes.

Néanmoins, la mortalité due aux maladies cérébrovasculaires suit une tendance à la baisse depuis 2012, atteignant en 2022 son niveau le plus bas : 44,0 décès pour 100 000 habitants. L’AVC entraîne toutefois de lourdes conséquences psychologiques, une limitation des activités quotidiennes essentielles comme manger ou se laver, ainsi que des difficultés dans les activités instrumentales telles que l’utilisation des transports publics ou la gestion financière. Il a également un impact sur tous les aspects de la vie : social, professionnel, etc.

Les projections indiquent que l’incidence de l’AVC continuera d’augmenter, notamment en raison du vieillissement de la population. On estime que le nombre de personnes victimes d’un AVC dans l’Union européenne (UE) dépassera les 4,5 millions entre 2015 et 2035, soit une augmentation globale de 34 % du nombre total de patients touchés par un AVC en Europe.

Facteurs de risque de l’AVC

Jusqu’à 90 % des AVC pourraient être évités en contrôlant les facteurs de risque modifiables :

  1. Hypertension artérielle,
  2. Diabète,
  3. Tabagisme,
  4. Obésité,
  5. Hypercholestérolémie,
  6. Mode de vie sédentaire,
  7. Consommation d’alcool,
  8. Facteurs psychosociaux tels que le stress,
  9. Antécédents de maladies cardiaques.

Diagnostic et traitement de l’AVC

Un diagnostic et un traitement précoces sont essentiels pour améliorer la survie et les chances de récupération des patients victimes d’un accident vasculaire cérébral.

Le 10 avril 2024, le ministère de la Santé, en collaboration avec les Communautés autonomes, a approuvé la mise à jour de la Stratégie nationale de lutte contre l’AVC, initialement publiée en 2009, qui fixe des objectifs d’amélioration à tous les niveaux de prise en charge de cette maladie.

La prise en charge de l’AVC doit être globale, interdisciplinaire, coordonnée et centrée sur le patient. Les traitements de neuroréhabilitation et l’accompagnement des patients après un AVC sont essentiels pour réduire le handicap fonctionnel et améliorer leur qualité de vie. La rééducation neuropsychologique permet de travailler sur les déficits consécutifs à un AVC.

Selon la zone du système nerveux central touchée, une des conséquences possibles d’un AVC est l’aphasie, parmi d’autres séquelles. Ce trouble se définit comme une altération de la capacité à utiliser le langage, une pathologie du langage entraînant des difficultés à lire, écrire, s’exprimer oralement et/ou comprendre les messages oraux des autres.

Aphasie après un AVC

Quels types d’erreurs linguistiques présentent les patients aphasiques ?

Après un AVC, les patients peuvent rencontrer des difficultés de communication verbale, se traduisant par des erreurs dans la production du langage, des troubles de la compréhension et/ou des difficultés à retrouver les mots (anomie). Parmi les erreurs possibles figurent des erreurs grammaticales, des troubles de l’articulation verbale, des difficultés de fluidité dans la production des mots et des troubles de la compréhension. Ces troubles sont dus à des lésions affectant les régions cérébrales impliquées dans le langage.

La capacité verbale est une fonction latéralisée. La majorité des troubles du langage surviennent après une lésion de l’hémisphère gauche du cerveau, aussi bien chez les droitiers que chez les gauchers. En cas de malformation ou de lésion de l’hémisphère gauche à un stade précoce du développement, la dominance du langage peut être transférée à l’hémisphère droit (Vikingstand et al., 2000). Cela illustre le principe de la neuroplasticité cérébrale, selon lequel le système nerveux central peut se réorganiser et redistribuer certaines fonctions dans d’autres régions cérébrales après une lésion.

Zones cérébrales impliquées dans le langage

Les principales zones cérébrales impliquées dans le langage incluent :

  1. L’aire de Broca, située dans la partie frontale du cerveau, responsable de la production du langage et de la formation des mots.
  2. L’aire de Wernicke, située à l’arrière du cerveau, dans le lobe temporal, et impliquée dans la compréhension du langage.
  3. Le gyrus angulaire, situé dans la partie inférieure du lobe pariétal, qui joue un rôle clé dans la lecture et l’écriture.

De manière plus détaillée, l’organisation neuroanatomique du langage implique :

  1. Les aires 44 et 45 de Brodmann ou aire de Broca, situées dans le lobe frontal.
  2. L’aire 22 de Brodmann ou aire de Wernicke, située dans le lobe temporal.
  3. Les aires 39 et 40 de Brodmann ou jonction pariéto-temporo-occipitale, situées dans le lobe occipital.
  4. Les aires 17, 18 et 19 de Brodmann, correspondant respectivement aux aires visuelles primaires, secondaires et associatives, situées dans le lobe occipital.
  5. Le cortex préfrontal.
  6. Les structures sous-corticales, notamment les ganglions de la base : noyau caudé, putamen et pallidum.
  7. Les faisceaux de substance blanche, incluant les faisceaux intra- et interhémisphériques.
  8. Le thalamus, plus précisément les noyaux pulvinar et dorso-médian.
  9. Le mésencéphale, la protubérance, le bulbe rachidien, le cervelet et la moelle épinière.

Quels types d’aphasies peuvent survenir après un AVC ?

Les aphasies peuvent être classées en :

  1. Aphasies périsylviennes : la lésion est située autour de la scissure de Sylvius dans l’hémisphère gauche.
  2. Aphasies extrasylviennes (ou transcorticales) : la lésion est localisée dans la zone vasculaire située entre les territoires des artères cérébrales antérieure et moyenne, ainsi qu’entre l’artère cérébrale moyenne et l’artère cérébrale postérieure.

Les aphasies périsylviennes incluent l’aphasie de Broca, l’aphasie de conduction et l’aphasie de Wernicke. Les aphasies extrasylviennes comprennent quant à elles l’aphasie transcorticale motrice et l’aphasie transcorticale sensorielle.

Les patients présentant une lésion dans la zone extrasylvienne conservent la capacité de répétition, mais leur aptitude à nommer les objets est altérée. En revanche, les patients atteints d’une lésion périsylvienne présentent généralement une altération de la répétition fluide ou expressive. Ils rencontrent des difficultés à formuler des phrases bien structurées, et leur discours est limité à des expressions courtes. Ces patients peuvent lire, mais éprouvent des difficultés à écrire.

Aphasie de Broca

Dans les aphasies motrices, on observe un trouble de la parole caractérisé par un langage non fluide, une bonne compréhension et une répétition normale ou quasi normale. La prosodie, l’articulation et la grammaire sont préservées. Cependant, le patient présente des latences longues pour initier la parole, des expressions peu élaborées et, parfois, des paraphasies verbales.

Aphasie de Wernicke

Dans l’aphasie de Wernicke, la compréhension du sens des mots et des phrases est altérée. Les patients souffrant de ce type d’aphasie présentent généralement de graves déficits de compréhension, même pour des mots isolés ou des phrases simples. Cependant, leur capacité à produire un langage oral est préservée.

Les personnes atteintes d’aphasie de Wernicke peuvent produire de nombreuses paroles et parlent souvent en utilisant des phrases grammaticalement correctes avec une prosodie normale. Toutefois, leur discours peut manquer de sens et contenir des mots inexistants ou inappropriés.

L’aphasie de Wernicke est également appelée aphasie fluide ou réceptive. La lecture et l’écriture sont souvent gravement altérées.

Aphasie de conduction

L’un des traits distinctifs de l’aphasie de conduction est la difficulté à répéter correctement les mots ou les phrases, bien que la compréhension soit relativement préservée et que la production de la parole reste fluide.

Aphasie sensorielle

Les aphasies sensorielles partagent avec les aphasies motrices une bonne conservation de la répétition. Le langage conversationnel est fluide, mais marqué par un nombre important de paraphasies et un discours souvent vide de sens. La répétition est excellente et on observe fréquemment des phénomènes d’écholalie (répétition involontaire des mots entendus).

Neuroréhabilitation des aphasies après un AVC

Grâce à la neuroréhabilitation, il est possible d’intervenir sur ces déficits consécutifs à un accident vasculaire cérébral afin d’en atténuer les effets et d’améliorer la symptomatologie, avec un impact positif sur l’autonomie et l’indépendance des patients.

La rééducation du langage doit être abordée de manière segmentée, car elle implique différentes compétences : expression orale, compréhension orale, expression écrite et compréhension écrite, sans négliger la prosodie, le ton, le rythme ou encore le volume.

Comme mentionné précédemment, le langage est divisé en quatre dimensions :

  1. Expression orale : toute communication réalisée par la parole. Elle inclut le langage conversationnel, le langage réflexe ou de répétition, les séquences automatiques, la récitation, le chant et le rythme, la dénomination et le langage narratif.
  2. Compréhension orale : une compétence active qui mobilise des mécanismes linguistiques et non linguistiques et qui implique la capacité à écouter pour comprendre les messages oraux. Elle comprend l’audition phonémique, la compréhension des mots, la compréhension des phrases simples et complexes, ainsi que la compréhension des structures logico-grammaticales.
  3. Expression écrite : elle consiste à exprimer, par des signes conventionnels et de manière structurée, une pensée ou une idée. L’expression écrite comprend la mécanique de l’écriture, l’écriture sériée, la dictée de lettres isolées, la dictée de nombres, la dictée de mots et de phrases, la copie, l’identification de mots écrits, l’élaboration de phrases et l’écriture narrative.
  4. Compréhension écrite : il s’agit de la capacité à comprendre un texte, aussi bien en ce qui concerne la signification des mots que dans la compréhension globale du contenu. Elle inclut la discrimination des symboles et des mots, l’association phonétique, ainsi que la lecture de phrases et de paragraphes.

Dans le cadre de la rééducation du langage, qui constitue une fonction cognitive essentielle dans la vie quotidienne, les outils de neuroréhabilitation disponibles en neuropsychologie sont d’une aide précieuse pour aborder de manière pluridisciplinaire les symptômes résultant d’un accident vasculaire cérébral (AVC).

Bibliographie

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